Les impostures de « l’écriture web »

Si l’on en croît la vulgate de certains « experts » journalistiques ou marketing, écrire pour le web requiert un savoir-faire complexe et bien précis. Il s’agirait de suivre des règles incontournables, si l’on veut plaire au lecteur et à Google.

1- IL FAUT ECRIRE COURT SUR INTERNET

Ce point est soulevé par Morgane Tual dans son dernier coup de gueule via lequel elle raille ces formateurs sexagénaires débitant ce genre de règle absurde avec une “certitude insensée”.

Ecrire court à tout prix alimente l’idée qu’on ne peut pas créer de la profondeur sur Internet, que tout est forcément superficiel et creux. Difficile d’expliquer le rigorisme de l’impératif kantien en 140 signes…

En réalité, il ne faut pas écrire court, il faut écrire “dense” : dire un maximum de choses avec un minimum de mots. Mais ceci n’a rien de spécifique au web. Cela est vrai de toute écriture digne de ce nom, journalistique ou pas, qui distingue du contenu riche du verbiage, comme d’une bonne ou d’une mauvaise copie de philo.

Mais écrire dense, cela veut dire avoir des choses à dire, avoir de l’information, des faits à délivrer. Je me souviens de cette responsable d’un magazine spécialisé assistant à l’une de mes formations, qui contesta ma recommandation de concision. Alors que j’insistais sur la nécessité d’aller à l’essentiel, de servir le lecteur en lui mâchant l’information utile, elle objecta: “nous, on doit remplir du papier, le lecteur en veut pour son argent, il lui faut ses 130 pages”.

En réalité, le verbiage avait surtout pour fonction d’augmenter artificiellement la pagination rédactionnelle, pour augmenter le nombre d’insertions de pub.  Mais en admettant que le facteur kilo joue aussi auprès des lecteurs, il fallait fournir en ce cas plus  de contenus (informations, illustrations)… La dilution ne tient que sur des segments  presse peu concurrentiels, monopoles ou oligopoles qui ne durent pas éternellement.

Il faut certes adapter l’aspect visuel des contenus pour faciliter la lecture en moyenne 25% plus difficile sur un écran si l’on en croit Jacob Nielsen, ergonome expert ayant étudié la questions.

Cela signifie éviter des paragraphes “pavés” de quinze ligne sans aération dans lesquels le lecteur ne veut pas “entrer”. Eviter aussi les phrases qui n’en finissent pas, emplies de virgules, de gérondifs et de participes présents.

2- LE WEB, C’EST FORCEMENT MULTIMEDIA

A l’heure d’Internet, l’écrit est dépassé, il faut proposer de la vidéo, des animations interactives, des “serious games” et éventuellement un mélange de tout cela.

Non, l’écrit n’a pas disparu, bien au contraire, la lecture en général se porte bien et le texte foisonne sur Internet, comme en témoigne l’explosion des bases de données, textuelles pour la plupart. La question n’est pas d’apporter de la vidéo ou une animation pour faire “moderne” ou être dans la “tendance”, mais bien de savoir quel est le service rendu au lecteur.

Sous quel format, doit-on présenter l’information pour quelle soit la plus claire, la plus agréable, la plus facile à consommer ? Il n’y a pas de réponse unique à cette question, car les publics sont multiples. Pour certains, une interview vidéo sera le format le plus agréable. Pour d’autres au contraire qui ont peu de temps et préfèrent lire “en diagonale”, le texte sera plus adapté. On sait par ailleurs qu’une proportion importante de lecteurs sur Internet le fait depuis son lieu de travail, et tous n’ont pas un casque… Pour la discrétion ou l’open space, c’est donc un frein majeur.

En ce cas là, il semble judicieux de proposer les deux formats simultanés. Mais faut-il pour autant multiplier les formats ? Proposer tout en se disant que le lecteur fera lui-même son marché ?

Cette méthode faillit à l’une des missions essentielle du médiateur (ou « curator » selon le nouveau terme en vogue) : sélectionner l’information, la préparer pour la rendre digeste et servir ainsi le lecteur, d’autant plus qu’il est toujours plus submergé d’informations, de sollicitations visuelles, sonores, tactiles… olfactives demain ?

Le format retenu doit être fonction du propos. Pour raconter l’affaire Clearstream aux multiples rebondissements, une animation chronologique semble pertinente. Mais un schéma montrant les relations entre les différents acteurs ne sera-t-il pas plus efficace ?  Et en tout état de cause le format choisi ne remplacera pas les articles anglés sur telle ou telle question: la manipulation de Lahoud, la contre-manipulation de Sarkozy, le rôle de Villepin, la complicité des grand patrons…

le-petit-clearstream
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3- IL FAUT ECRIRE POUR LES MOTEURS

J’ai déjà dénoncé ce reproche adressé souvent aux journalistes web selon lequel ils sont soumis au méchant Google qui leur impose des règles et du coup, formate l’information.

Si l’uniformisation des formes et contenus journalistiques n’est pas toujours une vue de l’esprit, la faute en incombe aux journalistes, pas à Google.

Google a conçu des règles pour répondre à un souci de pertinence, de service au lecteur. Ces critères ne sont pas parfaits, et sont de plus en plus détournés (rançon de la gloire). Mais ils fonctionnent globalement, sinon Google ne détiendrait pas 65% de parts de marché dans le monde, en dépit d’une concurrence acharnée de Bing/Yahoo notamment.

C’est peut-être justement au niveau des écoles de journalisme ou par imitation grégaire rassurante que les journalistes finissent par écrire tous de la même manière. Comme ils parlent tous de la même façon en télévision ou en radio. Norme évolutive si l’on se rappelle bien les tons nasillards de nos premiers speakers.

Les critères de Google : richesse syntaxique, mises en forme (gras, titres…), popularité sont des indices de qualité. Et Google ne punit pas les textes longs, bien au contraire, incapable de saisir la pertinence contextuelle d’un texte long ou court. Ainsi pour une dépêche d’agence, il semble pertinent pour servir l’utilisateur de faire court compte tenu de son mode de consommation limité dans le temps. Pour un article de blog, cela dépend de la richesse du contenu lui-même

Par ailleurs, les usages évoluent vite et ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera plus demain. Ainsi des paginations horizontales limitées en 768 px de hauteur qui ont évolué d’abord avec l’augmentation des taux d’équipement en écran plus grands (du 15 au 19 pouces). Et ont été bouleversés ensuite par l’apparition de la molette sur les souris qui a fait éclore les navigations verticales à plat, sur l’initiative du précurseur 20 minutes. L’apparition des tablettes et du mobile va certainement changer encore les modes de lecture et de consommation de l’information.

Enfin, comme le rappelle Morgane, on tâtonne, on cherche, on teste… S’il y a bien une seule règle qui vaille, c’est celle de l’intérêt du lecteur qui appelle des réponses aussi diverses qu’il y a de publics différents.

4- IL FAUT METTRE UN MAXIMUM DE LIENS

Ajouter un grand nombre de liens, c’est bien pour le lecteur, car c’est lui offrir potentiellement plus d’informations. C’est d’ailleurs bien vis à vis des moteurs qui “récompensent” les liens internes et externes, indifféremment de leur nombre.

Oui, mais est-ce réellement un service au lecteur de l’étouffer sous l’information ? Pire encore sont ces liens automatiques générés à partir des tags qui noient les liens pertinents sous une masse d’autres inutiles ou éloignés du sujet principal.

Cette “infobésité” dessert le lecteur en lui faisant perdre du temps et en diluant le “sens” sous la masse d’informations.

Ce cas de figure est un exemple de l’arbitrage qu’il faut réaliser entre les fameuses règles de Google et l’intérêt du lecteur qui doit toujours rester la finalité.

5- LES SUJETS SERIEUX NE MARCHENT PAS

clowns

Les sujets sérieux, “high-brow topics” (haut du front), comme disent les Anglais ne fonctionnent pas. La politique, les sujets internationaux, tous thèmes profonds ne font pas d’audience.

Il faudrait au contraire ne fournir au lecteur que ce qu’il “demande”, à savoir des faits divers, du people, de l’insolite, du spectaculaire plus ou moins racoleur.

Il semble évident qu’une galerie photo sur les ravages du Tsunami fera plus d’audience qu’un dossier sur les subprimes. Mais rien n’empêche d’expliquer le principe de ces produits financiers lors d’un diaporama sur les raisons de la crise financière. Et mon expérience m’a prouvé que l’on peut faire de l’audience, certes pas dans les mêmes proportions, avec ce genre de sujets “sérieux”. Tout dépend du format, du propos, du contexte.

Car s’’il faut procurer au client-lecteur ce dont il a besoin, il faut aussi lui apporter ce dont il ne sait pas encore qu’il a besoin.

Le journaliste est aussi ce pédagogue qui, tout en satisfaisant son public, cherche aussi à l’instruire, à l’élever, l’air de rien, “par la bande”. Equilibre délicat où il convient de ne pas trop exiger de son lecteur pour ne pas trop se couper de lui. Sans tomber non plus dans le pur suivisme racoleur qui aboutit à un rejet tout aussi inéluctable, in fine.

Entre l’austère plat de haricots “politique internationale” et l’indigestion de bonbons Haribo “faits divers ou people”, il faut éduquer nos enfants-lecteurs à l’information. Cet équilibre complexe est ce qu’on appelle une ligne éditoriale

Les jeunes journalistes doivent donc prendre du recul par rapport aux règles qu’on leur dispense. Celles-ci ne sont pas paroles d’évangile, elles doivent être adaptées au cibles, au contexte de diffusion, aux sujets, au lieu de promotion dans le journal ou sur le site (page d’accueil, de rubrique ou de blog ?). Et garder à l’esprit que les usages changent vite et nécessitent surtout une écoute attentive pour s’adapter. Ainsi qu’une dose de créativité pour proposer.  Un bon supermarché fournit rayons ET têtes de gondoles.

Cyrille Frank

Directeur de l’ESJ-Pro Media Paris

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Crédit photo Abode of Chaos et tom_p via Flickr

96 commentaires sur « Les impostures de « l’écriture web » »

  1. Ressenti d’une fervente lectrice : écrire DENSE, très juste. Savoir distiller son propos est important.
    Deuxio. C’est perso, mais je déteste les notes avec vidéos et liens multiples. Je préfère que je journaliste mouille sa chemise et dessine lui-même son propos, comme dans un vrai journal. Je ne clique quasiment jamais sur le lien proposé.
    Tertio : pour une lecture fluide (et ça vaut pour vous, mister Cicero), j’aime que les notes soient justifiées. Plus facile de lire un texte justifié qu’un texte qui déborde de façon irrégulière. Allez, bises, je repars ds les corrections du prochain roman…

    1. Bonjour Valérie,

      Je te rassure les taux de clics des liens internes aux papiers sont faibles, moi-même je clique peu. Mais cela m’arrive quand même lorsque le sujet du lien semble particulièrement intéressant.

      Par ailleurs, quand on touche à des arguments contestables ou contestés, j’aime avoir la source pour valider ou invalider l’argument. C’est une logique plus « universitaire » que journalistique, mais cela apporte plus de profondeur au propos.

      Pour la justification j’en prends note, mais sur le web ça fait souvent des écarts irréguliers entre caractères, car le ré-alignement automatique n’existe pas, contrairement aux outils de traitement de texte. 🙂

      Bises biz

    2. pour une lecture fluide (et ça vaut pour vous, mister Cicero), j’aime que les notes soient justifiées. Plus facile de lire un texte justifié qu’un texte qui déborde de façon irrégulière.

      Je réagis sur cette idée qui me paraît fausse. Un texte justifié est peut-être plus plaisant à regarder, mais lorsqu’il s’agit de le lire, des lignes de longueurs variables offrent en fait un avantage, dans la mesure où ces variations constituent des points de repères visuels qui permettent à l’oeil de mieux s’y retrouver. A l’inverse, lorsque toutes les lignes ont exactement la même longueur, il est plus difficile des les différencier, et donc de progresser dans la lecture.

  2. Merci de remettre les pendules à l’heure 🙂

    Pour le point 4, certes, les liens ne sont pas toujours très utilisés, mais j’estime qu’ils apportent beaucoup de valeur au lecteur qui peut approfondir un sujet s’il le souhaite, mais ne l’handicapent absolument pas s’il souhaite passer rapidement sur le sujet.

    Pour le point 5, difficile il me semble d’avoir une opinion tranchée. De façon générale, les sujets légers ont plus de succès (au grand désespoir des auteurs de blog 🙂 ), mais cela n’empêche pas certains supports de grande qualité de rencontrer de beaux succès. Traiter des sujets légers de façon qualitative semble être une piste intéressante.
    Il est également possible de regrouper une audience plus limitée, mais de plus grande qualité autour de contenus plus pointus.
    Question d’objectifs…

    1. Bonsoir Jean,

      Tout à fait d’accord avec vous s’agissant des liens. Je ne parle que des excès. La profusion de liens n’est pas forcément un service à l’utilisateur, car c’est lui dire « allez, pioche, à toi de te débrouiller ». Du coup cela a une effet dissuasif qui a l’effet inverse, puisque personne ne clique sur ces liens

      Sur le principe, naturellement le lien hypertexte est une grande richesse !

      S’agissant du point 5/, je prétends qu’il est possible de parler de choses sérieuses en intéressant. Mais oui en effet, comme je le concède, il y a une différence d’audience entre un sujet sérieux vulgarisé et un sujet racoleur. Mais à moyen et long terme, ce sont les titres qualitatifs ou équilibrés qui durent. L’exemple de France soir est éclairant de ce point de vue. Le titre a décliné quand il a cessé de faire de l’enquête et du dossier pour ne faire que du fait divers et du people.

      Le Post est un autre exemple de cet échec, car il prouve que la taille de l’audience n’est pas une finalité si vos annonceurs fuient votre mauvaise image (+168% d’audience en un an, pertes importantes). Ou si les revenus publicitaires sont faibles du fait d’une audience bas de gamme ( CPM faible)

      Comme vous le dites très bien vous même d’ailleurs : « Il est également possible de regrouper une audience plus limitée, mais de plus grande qualité autour de contenus plus pointus. »

      Le seul problème, c’est la création de ghettos culturels réservés à une élite. Je suis pour la vulgarisation et la diffusion maximale du savoir et de la culture… Question de cohésion républicaine… 🙂

  3. Merci pour cet article ! J’ai passé une dizaine de minutes très agréable à le lire et je suis d’accord avec vous. il faut privilégier la qualité à la quantité !

  4. Vraiment un bel article !
    De façon générale, ton blog montre bien un souci d’exigence concernant les textes produits. On ne sombre pas dans la facilité ici et c’est un plaisir !

    Par ailleurs, l’impératif kantien en un tweet, pas simple c’est sûr…

    1. Merci beaucoup Aurélien, c’est bien aimable 🙂

      J’essaie en effet d’appliquer à mi-même ce que je professe aux autres : créer de la valeur. C’est pour cela que je prends le temps avant de publier et que mes stats sen ressentent, mais quelle importance ?

      C’est tout l’avantage du blog, pas de contrainte économique, ça change…

      A bientôt sur Twitter … ou ailleurs

      Cyrille

  5. Merci pour ce billet qui dispose d’une qualité souvent ignorée quand on parle du web : le bon sens! En particulier sur le rich media, je suis totalement convaincu par l’argumentaire : depuis que j’ai un Iphone, je lis davantage de texte lors de mes déplacements. Dans le métro la connexion ne permet pas de lire de vidéos, ni parfois de diaporamas, et je n’ai pas envie de me mettre des écouteurs dans les oreilles. Par contre lire les articles du Monde, ou bien des choses sauvegardées depuis mon ordi grâce à Read it later, ça je le fait beaucoup, y compris des articles longs. Pourvu que ce soit écrit dense et clair!

    1. Merci à vous Théo,

      Vous avez raison, il s’agit très souvent de bon sens qui tend à disparaître sous une couche de technicité artificielle ou un jargon « d’expert ».

      Cordialement

      Cyrille

  6. Tellement d’accord ! Le seul problème c’est qu’il y a un business autour de l’écriture pour le Web » du coup personne n’ose vraiment dire que ça n’existe pas !

    C’est un peu comme le bug de l’an 2000, tout le monde avait intérêt à dire que ça serait la cata et ça s’est autoalimenté

    1. Bonjour Eric, vous avez bien raison, pour décrire ce phénomène, je parle des « vendeurs de pelle » : http://www.mediaculture.fr/2010/09/04/nouveaux-medias-une-nouvelle-classe-dominante/

      « Dans la ruée vers l’or américaine de la fin du XIXe, sauf exceptions, les seuls qui firent fortune sont ceux qui vendaient les pelles et les pioches.

      Aujourd’hui, face à l’eldorado du web, les “vendeurs de pelles” sont les agences marketing, les consultants, les web-agencies, les fabriquants de matériel informatique… tous ceux qui ont intérêt à générer le plus d’investissement dans le secteur, à faire venir un maximum de prospecteurs. »

      🙂

  7. Le titre de l’article m’a fait peur, mais je vois bien que vous convenez dans celui-ci que quelques règles améliore grandement le positionnement sur Google, et le fait d’intéresser le lecteur (qui se fatigue plus vite sur un écran).

    Je vous rejoins complètement sur un point qui est d’adapter le discours à sa cible.

    C’est bien pour cela qu’il n’y a pas de méthodes toute faite, mais des contenus, voire une ligne éditoriale spécifiques en fonction de son site et de sa stratégie.

    Très bel article au passage, long, mais bon.

    1. Merci bien Sylvain 🙂

      Absolument ! Pas de « martingale » mais une adaptation aux publics, aux cibles, aux contextes… une stratégie édito en somme 🙂

  8. Bonjour,

    « Oui, mais est-ce réellement un service au lecteur de l’étouffer sous l’information ? Pire encore sont ces liens automatiques générés à partir des tags qui noient les liens pertinents sous une masse d’autres inutiles ou éloignés du sujet principal ».

    Ce passage est très intéressant et pertinent ! Certaines pages Web contiennent beaucoup trop de liens internes, souvent pour optimiser le référencement naturel. Parfois on s’y perd on a même du mal a retrouver la première page de lecture.

    amicalement

    1. Bonjour Lionel,

      Généralement quand un truc vous agace prodigieusement, il agace aussi beaucoup d’autres personnes. On appelle cela l’inter-subjectivité paraît-il…

      Les journalistes et producteurs de contenu perdent parfois de vue ce qui les intéresse eux, pour appliquer des techniques désincarnées. Il fautr revenir à soi et se dire « est-ce que j’apprécierais, moi ? »

      Amicalement

      Cyrille

  9. Le nombre de liens peut parfois faire peur (aux rédacteur mais c’est pas trop grave) au lecteur. Le Monde a (ou avait) choisit de masquer les liens (ni souligné, ni changement de curseur lors du passage de la souris) afin de ne pas polluer la lecture tout en favorisant le référencement de leurs pages.

    1. Bonjour Christophe,

      Masquer les liens pour ne pas gêner l’utilisateur tout en améliorant le référencement est une technique qui tend à détourner les critères de référencement de Google. Appliquer la règle en perdant l’esprit de la règle.

      C’est l’utilisateur que l’on doit servir, pas Google !

      Il faut mettre des liens utiles et visibles qui feront revenir les visiteurs et serviront bien plus le référencement que cette technique. D’autant plus que Google peut changer son algorithme du jour au lendemain (il l’a déjà fait sur le nombre de mots clés).

      Le Monde en agissant ainsi se met sous la dépendance de critères vides et peu fiables. C’est précisément une pratique que je ne recommande pas

      Cordialement 🙂

      Cyrille

  10. Je fais partie de ces formateurs d’école de journalisme (celle de Tours pour ce qui me concerne) que vous alignez en début de papier.Bon, je ne suis pas encore tout à fait sexagénaire, il me manque un peu moins d’une dizaine d’années. Et pourtant, votre papier me satisfait pleinement.Je viens de la presse magazine. Pour moi, en partie à cause de la concurrence, en partie parce qu’il doit pouvoir être lu pendant très longtemps et tenir la route, un article sur Internet doit être conçu, écrit avec une extrême exigence. Proche de celle des meilleurs magazines.
    Maintenant, pour le plutimédia, celui-ci contient en lui-même ses limites, celles de la complexité et de la durée.J’aime beaucoup le traitement de l’info du New York Times, face à des éléments aussi complexes qu’une pandémie, qu’un tremblement de terre ou qu’une crise économique. Mais il est inutile de sortir l’artillerie lourde chaque fois qu’on sort une actu.
    Idem pour les liens hypertextes. S’ils sont bien conçus, s’il participent à la hiérarchisation de l’info (notamment en menant le lecteur vers un papier d’éclairage), où des documents, et à condition qu’ils soient bien présentés, ils ont leur place. Mais point trop n’en faut.
    En revenir aux fondamentaux du journalisme, voilà mon crédo. C’est de toute façon notre seule façon de réagir face à notre mauvaise réputation (et là je parle en tant que journaliste, pas en tant que prof).

    1. Bonjour Laure,

      C’est surtout Morgane Tual que je citais et pour paraphraser Brassens, « le temps ne fait rien à l’affaire » 🙂

      C’est mon crédo également : les bonnes pratiques web, sont les bonnes pratiques tout court 🙂

      Je commence d’ailleurs mes cours généralement par ce préambule : pas besoin d’être schizophrénie, revenons aux fondamentaux.

      En effet, mais pour moi il ne s’agit pas tant de réputation que d’usages. Si l’on n’améliore pas la qualité de l’info, si l’on ne va pas à l’essentiel pour s’adapter à la nouvelle économie de l’attention, nous perdons nos lecteurs.
      Il en va donc surtout de la survie de la presse !

      Amicalement

      Cyrille

  11. Joli article, Cyrille, une fois de plus! Bien pensé, totalement en phase avec ce que tu dénonces, le formatage de l’écriture web.

    Mais juste une remarque: tu fais dans certes articles quasiment tout ce que tu dénonces article écrit pour google, avec intégration d’images multimédias, avec de nombreux liens.
    Elisée

    1. Merci Elysée,

      Je ne suis pas sûr en revanche que tu m’aies bien compris … Je ne dis pas qu’il faut ne mettre aucun lien, ni jamais publier de multimédia. Je ne dénonce que l’excès.
      Il se peut que les liens que je fournis ne soient pas tous pertinents, mais je réfléchis à chacun d’entre eux pour tâcher d’apporter un service : une profondeur d’info supplémentaire, un contexte, une argumentation… Après je ne suis pas infaillible non plus 🙂

      7 ou 8 liens par article compte tenu de leur longueur, c’est peu… (à l’exception d’un ou deux qui en fourmille, comme mon article sur « Trop de mémoire ou pas assez », car chaque lien appuie ma démonstration et c’est l’occasion de faire découvrir des sites très utiles au passage.

      Le multimedia, la video, l’animation ou le diaporama à tout prix, voilà ce qui me semble une erreur. L’écrit a encore une grande valeur mais il ne faut naturellement se priver de ces nouveaux formats, quand ils font sens

      1. Bonjour,

        J’ai lu avec intérêt cet article qui dénonce les excès des objets web (multimédia, liens, etc…) qui surchargent les pages sous couvert de règles qui n’en sont pas mais qui répondent à des exigences autres que celles du lecteur lui-même (publicité, modèle économique bancal, croyance dans la capacité de la nouveauté technologique à pouvoir répondre à tous les problèmes, etc…).

        Je ne reviens pas sur l’argumentation qui me semble judicieuse, et je voudrais seulement ajouter que cet article montre avec force, contrairement à ce que certains collègues peuvent penser, dire et professer, qu’il existe bien une écriture web, délicate car complexe dans sa construction, prenant en considération de multiples dimensions, lesquelles sont aussi multi-scalaires. Je pense, comme je le dis régulièrement à quelques étudiants journalistes, que celle-ci reste encore un champ très ouvert et que les expériences, nombreuses et cumulatives, doivent fondamentalement considérer deux choses : 1 – il n’y a pas d’internet sans liens, sans métalangage (ce qui suppose que l’on revienne parfois aux bases) ; 2 – que le contenu est la seule perspective à envisager et qu’en cela, il ne peut y avoir de « geeks de l’écriture web » ; par cela il faut comprendre que, dans certains cas, la technologie a pris le pas sur le contenu (profusion d’objets technos sans intérêt, « gadgétisation » de l’information qui formate des contenus en les réduisant à une portion congrue, création de blog pour le blog, etc…). La technologie qu’offrent aujourd’hui les langages de plus en plus puissant et communiquant, oeuvrant au sens plein du terme pour une dynamique des contenus, leur interopérabilité et leur mutualisation, n’a de sens que pour servir, dans des cadres socio-économiques toujours plus oppressants, le métalangage, c’est-à-dire, pour en revenir aux fondamentaux, à nouer des contenus, intrinsèquement à une page et dans la multitude que permet l’internet.

        En conséquence, la profusion de liens dans une page ne me gène aucunement, bien au contraire, quand ces liens sont réfléchis comme de vrais au-delà de la page. L’excès en question résiderait, dans son paroxysme, à faire que la page entière ne soit qu’un lien, une sorte d’enfermement, d’impasse de l’internet comme il en existe beaucoup. Cela ne me gène d’autant moins que j’ai le choix de cliquer les liens, de faire le pas pour aller au-delà de ce qui est mis en lien (là aussi, il y a encore beaucoup de travail à faire sur la construction même d’un lien, la facilité de fabrication ne doit pas faire oublier que le lien doit avoir du sens). C’est toute la différence entre les liens et les autres objets qui sont traités quasiment au même niveau dans cet article. Ces objets (galerie d’images, vidéos, etc…) me sont imposés, comme me sont imposés les encarts pubs (que je peux comprendre par ailleurs), je peux évidemment faire l’impasse, mais, dans le cas où l’écriture a été réfléchie, c’est tout un pan de l’article qui disparaît et toute la cohérence de l’ensemble en prend un sacré coup. De la même manière, n’étant pas fan de la technologie flash, donc pas énormément des web-docs qui sont quasiment tous fabriqués avec cette technologie, c’est tout un contenu, a priori intéressant, auquel je n’accède pas (je ne parle même pas de ceux qui n’ont pas le choix des accès à internet et qui surfent encore avec du réseau étendu ou des modems 128k), qui pourrait certainement être traité autrement si l’on relativisait quelque peu cette nouveauté technologique laquelle, d’ailleurs, n’en est pas (plus) vraiment une.

        C’est toute la complexité : dans des cadres institutionnels, d’entreprises commerciales, avec une pression économique et financière forte dans un domaine à forte concurrence, bourré de technologie développée par des entreprises elles-mêmes qui se tirent la bourre pour imposer des formats, une multitude d’objets qu’on ne peut absolument pas mettre au même niveau quant à leur portée, leur nature, des mégatonnes de contenu qui obligent à une culture du web doublement encyclopédique, etc., le journaliste doit composer dans un temps relativement court avec l’ensemble de ces dimensions. Pour tout cela et j’en passe, il n’y a, à l’heure actuelle aucune règle, exceptée les deux que j’ai eu l’audace de rappeler ci-dessus, aucun modèle d’apprentissage, aucune formation qui pourrait faire le tour de la question de l’écriture web. D’une certaine manière, il ne s’agit pas d’impostures comme dit dans le titre, mais plutôt d’énormes réductions de la complexité de l’écriture web telle qu’elle est là où, a contrario, il faudrait peut-être la prendre à bras le corps.

        Bien cordialement

        1. Bonjour Sdj,

          Merci pour ce long et beau commentaire 🙂

          Je souscris très majoritairement à votre propos. Naturellement le nombre de liens est beaucoup moins pertinent que leur qualité. Si tous apportent un vrai enrichissement à l’article initial, sont directement reliés au propos et sont formulés clairement…

          Toutefois quand on cherche à répondre à ces trois critères, on se rend compte généralement que la plupart des liens que l’on souhaitait faire ne tiennent plus.

          Par ailleurs la profusion de liens a un effet dissuasif. C’est comme les digressions trop nombreuses. Au bout d’un moment, on n’écoute plus. Au delà d’un certain enrichissement, on ne regarde plus les liens, car le choix excessif devient inhibiteur. Il y a alors oblitération inconsciente de ces digressions.

          Dans un souci pédagogique (favoriser la consultation des liens), mieux vaut en mettre moins et plus ciblés sur le propos direct de l’article (développement d’un point, justification et preuve).

          Mais là encore cela dépend du public. Pour des universitaires, les liens non seulement ne sont pas gênants, mais sont même requis ! Pour du grand public, la vulgarisation passe par la simplification et donc des choix.

          Le titre, un brin racoleur j’en conviens, dénonce les mauvaises interprétations de l’écriture web. Il y a naturellement toujours une adaptation du propos au médium quel qu’il soit et Internet ne déroge pas à la règle… Mais ce formatage doit rester souple, créatif, évolutif. c’est mon propos comme vous l’avez bien saisi. 🙂

          Amicalement

  12. Je n’ai pas tout retenu de ce long article mais il y a une chose que j’ai retenue et je pense que ce sera pour toujours: la magnifique dialectique de « l’austère plat de haricots et du sac de friandises ».

    Un type qui écrit son papier en pensant à un devoir d’utilité pour les générations futures… bah y’en a bien qui vont trouver ça vieux-jeu ou « bisounours », terme éclos sur le web qui commence déjà à pourrir le vocabulaire de nos chers politiciens.

    Pour ma part je retrouve dans un tel « détail » – en réalité, des fondations – la grandeur qui m’a fait m’attarder sur ce site il y a quelques temps, la hauteur de vie qui a amené ma mère à venir rencontrer cette France génératrice de lumières, dans les années 60.

    This shitty world sometimes produces a rose!

    Il est si rare de trouver une cérébralité qui ne soit pas au service de legos et autres petits pâtés de sable… ;o)

    Sinon, pour revenir plus prosaïquement sur l’analyse des procédés mis en oeuvre, je voulais parler des liens hypertexte. Je les ai pour ma part découverts un peu avant 2000 dans une encyclopédie, le Bibliorom Larousse. Ca m’a juste sidéré, comme une nouvelle merveille du monde. Le hyper m’a figuré un saut dans l’hyperespace.
    Aujourd’hui avec Wikipedia, je peux partir « en ballade » sans autre limite que le temps.

    Pour revenir au format d’un article, surtout de journalisme « pro », on imagine mal un hyperlien 3 fois par phrase comme dans une encyclopédie. Ou une pelletée de liens à la fin qui disent un peu « tiens, si tu aimes les devoirs de vacance et les jeux Fernand Nathan, reprends-donc un peu de délicieux salsifis avec tes haricots! ».

    Pourtant, en tant que lecteur, certes curieux, ce serait une erreur de ne pas en saupoudrer un petit nombre – idéalement des points *cruciaux*, soit par l’explication d’un concept ou une traçabilité/chronologie.

    Quoi qu’il en soit j’ai adoré trouver la notion de pédagogie au centre du mouvement de passeur d’information.
    Et à ce titre, comme un entraîneur physique, c’est certainement lui et lui seul (enfin avec ses confrères) qui détient les clés pour nous faire progresser au-delà de nos capacités actuelles.

    En termes de télévision je pense par exemple à Alexandra Sublet/ C’est à Nous sur France 5 et Sophie Davant sur Télématin qui sous des airs de parler de la pluie et du beau temps savent injecter une dose savante d’élévation du débat, à portée de la ménagère X.

    Pour avoir connu ce qui se dégueule sur les grands-messes cathodiques aux USA, au Mexique et en Espagne, je peux dire que, finalement, un demi-siècle plus tard, la diffusion culturelle en France a peut-être un gros « peut mieux faire » tout rouge sur son cahier, mais quand même, y’a de beaux restes! Surtout quand on regarde à côté…

    Ce qui n’est pas une raison bien sûr pour confier la direction des programmes à Benjamin Castaldi ou Nikos, on est d’accord.

    Au moins, et même si j’écris là en pleine nuit, au moins les canaux culturels qui nous rajoutent à chaque fois un peu de hauteur de vue ne sont pas dans un ghetto horaire, sur le net…
    Car à observer objectivement les mass-média télévisuels, c’est à croire qu’il ne faut faire avancer spirituellement que les retraités, les rentiers et les chômeurs… il est grand temps de rebaptiser une émission comme celle de Philippe Lefait « Des mots de 3 heures du mat ».
    Alors les autres, tous les autres, seront chaque année moins nombreux à risquer de débarquer un jour sur Mediaculture plutôt qu’uniquement sur les forums d’Endemol, Closer ou de vidéos type Jackass.

    Mais peut-être que la solution pourrait venir du net? Contre-braquer vers un supplément d’acuité mentale, l’air de rien?

  13. Excellent papier, dont je retiens plus particulièrement ceci : « il ne faut pas écrire court, il faut écrire “dense”. » L’art d’écrire pour le Web, il est là, notamment.

    1. Merci GP, oui en grande partie. Plus vrai encore sur le web compte tenu de l’attention plus difficile à capter, mais vrai en général également.
      C’est pourquoi un journaliste est un technicien de l’écriture, pas un écrivain. 🙂

      Sauf certains papiers et reportages « gonzo-exceptionnels »

  14. En tant que consultant référencement ayant une sensibilité pour l’écriture web je trouve ce billet très bon.

    En fait seul le titre me chagrine (un peu) : ce que vous attaquez n’est pas l’imposture de l’écriture web mais plutôt les mythes sur l’écriture web (les internautes ne lisent pas, une image vaut 1000 mots etc.).

    1. Merci Sébastien,

      Je confesse l’exagération (volontaire) de mon titre.
      Tout comme d’illustres prédécesseurs, j’utilise le raccourci abusif pour interpeller. Et ça marche 🙂

      Cf Nietzsche « Dieu est mort », Sartre « l’enfer, c’est les autres » etc.

      C’est aussi une technique « marketing ». Imposture est plus fort que mythe.

      Comme vous l’avez vu, mon propos est plus nuancé que cela, je ne dénonce que les abus de l’écriture web.

      A moi de ne pas abuser moi-même de la technique marketing précédemment décrite 🙂

      Bien cordialement

  15. Bonjour Cyrille,

    Ta réflexion est très intéressante, et je partage nombre de tes conclusions. Mais je n’aime pas le titre : « Les impostures de l’écriture web » ni la position qui consiste à suggérer que les « règles d’écriture web » c’est bon pour les radoteurs sexagénaires psychorigides.

    Je me souviens, lors d’une de nos premières discussions, Jean-Marc Hardy m’avait dit « je n’aime pas parler de règles mais plutôt de bonnes pratiques ». Pour ma part, je ne crois pas que les « règles » soient mauvaises. Elles peuvent même aider. Ecrire pour un site Internet ne va pas du tout de soi. C’est pour cela que l’on a besoin de repères, de « bonnes pratiques » ou de « règles » peu importe comment on les appelle.

    On n’écrit pas pour un site comme on écrit pour un journal papier. On ne pense pas la narration linéaire comme on pense la narration hypertexte. Dans un cas, on peut faire entrer le lecteur dans le raisonnement de l’auteur et le tenir jusqu’au bout. Dans l’autre, ce lecteur peut s’échapper à tout moment par un lien hypertexte. Il n’en fait qu’à sa tête, ce lecteur ! Alors il faut imaginer différents scénarii/chemins de lecture et proposer plusieurs niveaux d’infos, travailler la « granularité de l’info » comme dit Muriel (Vandermeulen) ou « l’écriture en volume » dont parlait déjà Joël Ronez en 2007 dans son excellent petit livre « L’écrit web ».

    Tout cela, ça demande une bonne connaissance du « terrain » : le média web et ses possibilités techniques. Il y a des « règles » à suivre malgré tout. Il faut se rappeler les longs textes print « jargonesques » sans un seul lien, directement importés sur le web et jamais lus (d’ailleurs je me demande s’ils étaient lus en print aussi…). Ou bien les discours marketing blablateux complètement vides et inutiles que l’on pouvait trouver aux débuts du web (et même encore maintenant – il faut le temps que les CR de pub se penchent vraiment sérieusement sur le web).

    Les règles « faire court », « explicite », « éviter le discours marketing » etc., etc. ont quand même fait progresser un peu le shmilblik.

    Le cerveau humain est « messy » comme aime à le rappeler Rachel Lovinger de Razorfish, spécialiste du web sémantique. Le web reflète le chaos de l’intelligence et du savoir humain. Le web est un media sur lequel l’écrit sert à tout : navigation, information, communication, vente. C’est un media magnifique et… « very messy » !

    Comment organiser ce grandiose chaos virtuel et offrir la bonne information au bon moment ? Voilà un sacré challenge à relever pour les professionnels du web, référenceurs, ergonomes et rédacteurs web en première ligne.

    Si les règles peuvent nous aider dans ce travail d’amélioration de la qualité éditoriale web, alors c’est bien. Je trouve que les règles, c’est comme la religion. Pas mauvais en soi. Il faut simplement faire attention à la manière de les interpréter, sans dogmatisme. Et surtout se rappeler que chaque site, chaque cas est différent, unique. La sueur, l’observation, l’analyse, il n’y a que ça de vrai.

    Allez, assez parlé, au boulot !

    1. Bonjour Eve,

      Merci de ce long et bon commentaire ainsi que du compliment.

      Comme je le confesse auprès de Sébastien ci-dessus :

      Mon titre est volontairement exagéré et donc un brin racoleur :
      Tout comme d’illustres prédécesseurs, j’utilise le raccourci abusif pour interpeller. Et je crains qu’il ne faille en venir là pour retenir un peu de cette attention fugace (cf mon papier http://www.mediaculture.fr/2010/10/28/comment-la-course-a-l%E2%80%99attention-renforce-la-societe-de-l%E2%80%99ego/)

      Je ne fais en cela qu’imiter d’illustres prédécesseurs tels Nietzsche « Dieu est mort » ou Sartre « l’enfer, c’est les autres » etc..

      Comme vous l’avez vu, mon propos est plus nuancé que cela, je ne dénonce que les abus de l’écriture web.

      A moi de ne pas abuser moi-même de cette technique marketing…

      Je souscris à tout ce que vous dites : « Et surtout se rappeler que chaque site, chaque cas est différent, unique. La sueur, l’observation, l’analyse, il n’y a que ça de vrai.

      Je ne dis pas autre chose. 🙂

      Bien cordialement

  16. Oui, et ce titre fonctionne parfaitement si l’on en croit le nb de commentaires postés suite à l’article, avec tout un tas de longues logorrhées sans un lien qu’on lit passionnément jusqu’au bout 🙂

    Les lecteurs passionnés peuvent ingurgiter de grosses quantités de textes, même sur le web. Et c’est une des nombreuses exceptions à la règle ‘écrire court » : écrivez court sur les pages de « lecture scan » mais ne vous restreignez pas si le propos est passionnant, si le récit est intéressant !

    Une fois que le l’internaute est accroché par l’histoire, capté par un processus narratif, il lit jusqu’au bout, même en ligne !! (à ce propos, relire l’étude Eyetrack07 du Poynter institute).

  17. Mais la question est : cet article est-il référencé sur Google Actu ? 🙂 Eh oui car aujourd’hui, nos patrons à nous, pauvres journalistes web que nous sommes, nous serinent qu’un article ne vaut rien s’il n’est pas référencé sur Google Actu. Pas Google tout court, non, Google Actu. D’où la perte de temps considérable que l’on passe à reformater un article toutes les dix minutes afin qu’il soit enfin pris en compte par le divin moteur de recherche…

    Cela dit, si on se débrouille bien, ces soucis de mise en forme n’affectent finalement pas trop le fond et le style. Les règles concernent surtout la présentation des images (pas trop grandes par rapport au texte), le travail sur le titre, l’inclusion de textes en gras, etc. Là où on rame un peu, c’est au niveau de l’inclusion de paragraphes. En effet, Google Actu aime les paragraphes. Un texte de 10 lignes divisé en deux paragraphes de 5 lignes a plus de chances d’être repris sur Google Actu que s’il est présenté en un bloc. Mais attention, ces paragraphes doivent faire au moins 3 lignes, sous peine d’être considérés comme du « texte fragmenté » (et là, c’est le drame)… Et nous voilà obligés d’étirer une idée, comme par exemple d’annoncer la date de sortie d’un titre en trois lignes alors que ça pourrait tenir en une mention : sortie le tant…

    Précisons tout de même que lorsqu’un site est bien programmé, le journaliste n’a nul besoin de se prêter à toute cette mascadade. Il lui suffit d’entrer des mots-clés et le tour est joué. Dans ces conditions, n’est-il pas utile de rappeler aux patrons que l’investissement dans un bon webmaster n’est pas un luxe ?
    Voilà, c’était juste le petit témoignage d’une journaliste du web.

    1. Merci Mokuten de ce très intéressant éclairage !

      A mon époque, je n’avais pas à formater les textes pour Google actu. On franchit un cran là… Avec toute l’absurdité que vous dénoncez quand cette recommandation devient systématique.

      Oui les tags et les mots clés sont des trucs pour gonfler le positionnement de Google. Mais quel service au lecteur ce mécanisme automatique produit-il ? Pas bien grand. Les nuages de tags sont très peu cliqués.

      Cela peut être un moyen de produire des liens thématiques qui agrègent plusieurs articles sur un même sujet. Utile si tagguing est bien fait au niveau de l’éditing des contenus. Ce qui est assez rare, si j’en crois mon expérience, il y a toujours quelques ratés qui ôtent tout crédit à l’ensemble de la page.

      On a et on aura sans doute (ne jurons de rien toutefois) toujours besoin d’être humains pour organiser l’information, structurer la pensée. Croisons les doigts, sinon adieu les journalistes et autres médiateurs.

      Bien cordialement

  18. Les tags, au niveau des lecteurs lambda ne sont pas forcément très utiles, j’en convient. Mais pour ceux qui recherchent l’info, ça peut être un des moyen de détecter le réel contenu d’un post ou d’une autre prod sur Internet. Je me sers aussi de Wordle, ça donne des indications qui peuvent être riches d’enseignement.

  19. cet article me fait réagir :

    1 – Il ne faut pas écrire de longs articles => je suis totalement d’accord. là personnellement, j’ai juste lu les grandes lignes : les titres et les puces, quelques trucs par ci par là… mais au fond qu’est-ce que je retiens ? ben pas grand chose…. donc je pense qu’il faut trouver un juste milieu et que chaque site et chaque style est différent… mais là, sincèrement, j’ai failli fermer la fenêtre sans lire l’article quand j’ai fait défiler la scrollbar….

    2 – « Ne pas écrire pour les moteurs de recherche » dit il en optimisant son texte en usant à outrance la balise

    Pour le reste je suis assez d’accord… mais cet article sert plus de troll que d’autre chose…

    désolé pour la mauvaise critique…

    1. Bonjour Thibaut,

      Aucun problème avec les mauvaises critiques, comme vous dites chaque site, chaque style est différent. C’est justement contre les règles toutes faites que je m’insurge.

      Je cherche à remettre le lecteur au centre, pas le moteur qui n’est qu’un moyen détourné de le servir. Par exemple, le gras que j’utilise beaucoup me sert à baliser le regard du lecteur sur les éléments de sens importants. Je ne mets pas systématiquement les mots-clés en gras, seulement les idées fortes. Voilà le genre d’arbitrage dont je parle et il y en a d’autres, si vous reliez bien le texte.

      Un troll ? Nous n’en avons pas la même définition. J’échange des idées argumentées et n’agresse personne, contrairement à vous via ce terme déplaisant.

      Vous avez trouvé le texte trop long ? C’est sans doute que vous n’étiez pas suffisamment intéressé par la thématique, ou pas vraiment mon coeur de cible. Ce n’est pas grave, non seulement on ne peut pas plaire à tout le monde, mais il ne faut surtout pas essayer de le faire, sous peine de choisir des positions molles, sans personnalité qui se contentent d’apporter le « minimum dénominateur commun ».

  20. Je suis tout a fait d’accord que le Web n’a rien inventé. Pour avoir été rédactrice dans une ancienne vie, et maintenant architecte d’information pour l’écran, j’ai été aux deux écoles. Lorsque j’ai appris les « bons principes de rédaction pour le Web », j’ai finalement appris à écrire avec concision et clarté.
    Ce que je retiens, en rédaction comme en architecture d’information, c’est qu’on le fait d’abord et avant tout pour un utilisateur (ou un lecteur). Ce qu’on livre doit être pertinent, utile, à valeur ajouté. Il y a donc toujours une analyse à faire avant de livrer.

  21. Bonjour,

    Je découvre seulement votre article. L’analyse me semble effectivement pertinente.

    Moi-même qui écrit pour un sujet « de niche » (le rail belge vu par un navetteur) j’essaye inconsciemment d’appliquer ce que vous écrivez.

    En ce qui concerne les liens, je pense que c’est une bonne chose de pouvoir en glisser de temps à autre, pour offrir un peu de diversité au lecteur, d’autant plus que comme il consomme de plus en plus souvent en mobile (tablette ou smartphone), c’est lui donner un bonus. Ce que j’essaye de faire chaque vendredi lorsque je fais le portrait d’une catégorie de voyageurs.

    Merci pour l’article.

    1. Merci à vous ! Les liens, c’est un vrai service au lecteur, bien d’accord ! En revanche, pas trop. C’est comme tout, il faut en chaque chose, garder mesure. Trop de liens asphyxie et décourage le clic en réalité. par ailleurs je crois qu’il crée aussi la frustration de passer à côté de plein de choses. Mieux vaut en offrir deux-trois pertinents. A moins qu’on se serve du lien comme élément de preuve : à chaque argument, un lien pour le soutenir.

  22. J’aime bien votre article.
    Cela nous change du consensuel et du bateau.

    Pour ma part, j’insiste sur le travail de la glaise : les mots.
    Car tout le barnum technologique les occulte parfois.

    Capter l’attention, la conserver et ne pas la gaspiller nécessitent le travail des mots. Je dis là une évidence : c’est ainsi depuis l’Antiquité

    1. Merci Etienne !

      Oui je suis bien d’accord, tout part des mots : ils doivent être précis, concis, simples… pas facile. C’est ce qu’on essaie de faire sur quoi.info, mais on a encore une marge de progression 😉

  23. Euh juste une remarque de vocabulaire qui m’a fait tiquer.

    Les sujets sérieux en anglais, c’est high-brow topics, pas eyebrow.

    « Brow » , c’est le front. Les intellectuels sont censés avoir le front haut alors que les personnes frustres ont le front bas (low-brow) selon les théories de la phrénologie (la science qui étudie la physionomie) de la fin du 19ème siècle. Il existe aussi le terme « middle-brow » pour qualifier les activités « faciles ».

    Eyebrow, ça veut dire sourcil.

    Sinon j’aime votre article.

    1. Merci doublement : pour la correction et pour la louange 🙂 je croyais qu’il s’agissait de sujets compliqués qui faisaient lever le sourcil… J’intègre la modif tout de suite.

  24. Euh juste une remarque de vocabulaire qui m’a fait tiquer.

    Les sujets sérieux en anglais, c’est high-brow topics, pas eyebrow.

    « Brow » , c’est le front. Les intellectuels sont censés avoir le front haut alors que les personnes frustres ont le front bas (low-brow) selon les théories de la phrénologie (la science qui étudie la physionomie) de la fin du 19ème siècle. Il existe aussi le terme « middle-brow » pour qualifier les activités « faciles ».

    Eyebrow, ça veut dire sourcil.

    Sinon j’aime votre article.

    1. Merci doublement : pour la correction et pour la louange 🙂 je croyais qu’il s’agissait de sujets compliqués qui faisaient lever le sourcil… J’intègre la modif tout de suite.

  25. Merci pour ce papier qui rejoint tout à fait ce que j’enseigne à mes étudiants en journalisme (je ne fais pas partie des sexagénaire, pas pas très loin…).
    Juste une précision, l’étude Nielsen que vous citez est assez ancienne (1997). Or les capacités de lecture sur écran se sont depuis beaucoup améliorée. Nielsen a refait une enquête en 2010 (je ne retrouve pas le lien là maintenant) essentiellement tournée vers les tablettes. Il apparaît que, sur cet écran-là, la différence de lecture n’est que de 6 %. Si mes souvenirs sont bons, la lecture sur écran d’ordinateur restait un peu plus lente, mais c’est souvent parce que, pour les personnes étudiées, le PC renvoie au travail, et donc pas à une lecture loisir comme l’est en général le journal ou le magazine.

    1. Bonjourt Laure,

      Désolé du délai de réponse, j’étais par monts et par vaux…

      Merci à vous ! Oui, en effet ce papier date un peu (je l’ai écrit en 2010 je crois), j’ai moi-même cité ce lien dans plusieurs formations, le voici : http://www.useit.com/alertbox/ipad-kindle-reading.html

      Le facteur contextuel joue indéniablement, mais avant cela, des aspects physio : réglages luminosité, taille police etc. Même si les écrans se sont améliorés, il suffit de voir les gens plisser des yeux devant leur ordi… (oubliant, ce faisant l’usage du CTRL+ et CTRL- pour zoomer et dézoomer, ce que je leur rappelle au passage …

      Il faudrait en effet que je remette mon papier à jour, merci 🙂

      Bonne continuation !

  26. Merci pour ce papier qui rejoint tout à fait ce que j’enseigne à mes étudiants en journalisme (je ne fais pas partie des sexagénaire, pas pas très loin…).
    Juste une précision, l’étude Nielsen que vous citez est assez ancienne (1997). Or les capacités de lecture sur écran se sont depuis beaucoup améliorée. Nielsen a refait une enquête en 2010 (je ne retrouve pas le lien là maintenant) essentiellement tournée vers les tablettes. Il apparaît que, sur cet écran-là, la différence de lecture n’est que de 6 %. Si mes souvenirs sont bons, la lecture sur écran d’ordinateur restait un peu plus lente, mais c’est souvent parce que, pour les personnes étudiées, le PC renvoie au travail, et donc pas à une lecture loisir comme l’est en général le journal ou le magazine.

    1. Bonjourt Laure,

      Désolé du délai de réponse, j’étais par monts et par vaux…

      Merci à vous ! Oui, en effet ce papier date un peu (je l’ai écrit en 2010 je crois), j’ai moi-même cité ce lien dans plusieurs formations, le voici : http://www.useit.com/alertbox/ipad-kindle-reading.html

      Le facteur contextuel joue indéniablement, mais avant cela, des aspects physio : réglages luminosité, taille police etc. Même si les écrans se sont améliorés, il suffit de voir les gens plisser des yeux devant leur ordi… (oubliant, ce faisant l’usage du CTRL+ et CTRL- pour zoomer et dézoomer, ce que je leur rappelle au passage …

      Il faudrait en effet que je remette mon papier à jour, merci 🙂

      Bonne continuation !

  27. Les contenus denses sont importants. Les contenus multimédias aussi. Mais le plus important c’est de s’adapter à son lectorat. Je n’écris d’ailleurs pas du tout de la même façon suivant les différents sites web sur lequel je publie. Certaines thématiques attendent (ou plutôt les lecteurs de ces thématiques attendent) des contenus visuels, légers alors que d’autres préféreront du textuel, fouillé et dense.

    Ce n’est pas forcément évident de trouver le bon dosage et s’il y a bien quelque chose pour lequel je suis convaincu c’est que l’internaute a toujours le dernier mot : c’est lui qui choisit et c’est lui qui sait ce qu’il veut.

    Aux rédacteurs de connaître ses attentes afin de produire le contenu qui fera mouche.

  28. Les contenus denses sont importants. Les contenus multimédias aussi. Mais le plus important c’est de s’adapter à son lectorat. Je n’écris d’ailleurs pas du tout de la même façon suivant les différents sites web sur lequel je publie. Certaines thématiques attendent (ou plutôt les lecteurs de ces thématiques attendent) des contenus visuels, légers alors que d’autres préféreront du textuel, fouillé et dense.

    Ce n’est pas forcément évident de trouver le bon dosage et s’il y a bien quelque chose pour lequel je suis convaincu c’est que l’internaute a toujours le dernier mot : c’est lui qui choisit et c’est lui qui sait ce qu’il veut.

    Aux rédacteurs de connaître ses attentes afin de produire le contenu qui fera mouche.

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